DOULA : ACCOMPAGNER LA VIE

Le terme de doula est apparu aux états unis en 1973 pour la première fois. Partout dans le monde, elles portent le nom de Doula. Si la sémantique est récente, les doulas œuvrent depuis l'antiquité, on peut dire qu'elles ont toujours existé, n'étant même pas nommées parfois, il s'agissait des grands mères, des sœurs, des mères, celles qui avaient le savoir à transmettre...

Bon nombre de femmes ont déjà été traumatisées par leur accouchement et sont restées ainsi, sans écoute, sans soutien, sans partage ni échanges pour exprimer leur vécu et guérir cela.

Aujourd'hui, il y a comme un état d'urgence autour de la naissance, comme si c'était vraiment quelque chose de dangereux, qu'il fallait absolument maîtriser et contrôler, comme si la vie ne savais plus faire son chemin toute seule.

En France, 95% des accouchements se passent à l’hôpital.

Cet acte d'enfanter a changé, faisant oublier que c'est un processus naturel, initiatique.

Il ne s'agit pas de refuser le monde hospitalier et les traitements quand il y en a réellement besoin. La plupart des parents ne savent pas ce qu'est une péridurale ni l'effet que cela a sur le bébé. Les interventions comme ouvrir le corps au bistouri (épisiotomie ou césarienne) ont beaucoup augmenté ces dernières années. C'est une grande chance en France d'avoir de véritables professionnels de la santé, expérimentées et compétents pour intervenir en cas de besoin. Mais le phénomène de médicalisation systématique, limite incontournable, bloque la connaissance que l'on porte dans son corps, un savoir faire, et l' apprentissage qu' offre l'accouchement physiologique et naturel.

Ce corps devenu inconnu et étranger, en qui nous avons perdu confiance alors que c'est l' outil le plus précieux et qu'il est fait pour ça!

Beaucoup de livres, de sites, d'applications existent pour informer et répondre de façon technique à toutes les questions qui entourent la naissance.

Le savoir est illimité : le poids du bébé, son sexe, son patrimoine génétique. Quel lit ou quel siège acheter pour respecter son développement moteur ? Tant de réponses sans une place pour rencontrer l'individualité de chaque famille et respecter leurs besoins. Sans écouter une seule fois où se situent leurs envies profondes, leur sagesse intérieure, leur potentiel et leur limites.

La doula est là, à cet endroit précis.

Les motivations de cette future famille l' appelant sont nombreuses et variées.

Dans la multitude des cas particuliers, on trouve en général cette envie de pouvoir prendre le temps de se raconter, d'être écoutée, et de sortir de l'état d'urgence.

Et les doulas répondent présentes.

Pour la définir, il est préférable de parler de qualités plutôt de compétences, car il est question d'une manière d'être.

Elle est le chaînon manquant pour une naissance humaine aujourd'hui.

Elles sont à l'écoute de tous, quelque soit l'appartenance religieuse, politique, sociale, ou sexuelle, sans jugement pour leur choix mais véritablement au service du respect de l'identité de chaque famille et de la physiologie.

La doula cherche avec les parents les bons outils, elle est celle qui accompagne dans les choix.

Une qualité principale de la Doula est de rester intègre pour ne pas influencer.

Elle reste disponible à tout moment lors de la première année de la naissance, l'idéal étant son investissement à partir de 32 semaines de grossesse.

Cela prendra la forme de rencontres à domicile, ritualisées comme un suivi. Il s'agit alors d'un accompagnement global. Les thématiques proposées lors de ces rencontres sont décidées ensemble avec les parents : le choix du lieu de l'accouchement, la place du père, être mère, comment nourrir son enfant, etc...

La doula est une réponse à un besoin, elle apporte la sérénité et le calme.

Elle protège l'intimité.

Elle donne confiance.

Elle permet l'expression libre de la sensibilité du père, de la mère, de notre humanité.

Sa générosité se traduit par de l'écoute.

Elle est là pour aider au mieux la femme en travail.

Elle est une gardienne de la vie qui fait son chemin.

Laisser au bébé le temps d'arriver, au rythme du corps.

Au moment de l'accouchement, le temps s'arrête et la femme est dans un autre espace, et comme dans tout rituel initiatique, il y a des étapes de lâcher prise à passer. La femme en travail a alors besoin de soutien, de douceur, de confiance et d'écoute pour franchir ces caps.

La doula guide la femme pour accoucher sans craintes, pour rester dans sa bulle, pour libérer les hormones nécessaires au bon déroulement de l'accouchement.

Elle révèle aussi toutes ses capacités chez le partenaire : un pilier, un bouclier, un gardien et encore bien d'autres facettes.

Faire de ce passage de vie un souvenir nourrissant pour les parents, quelle belle mission !

Chaque Doula a sa couleur, ce que je veux dire c'est qu'elle va apporter ce qu'elle est, ce qui la rend unique, à une famille qui elle aussi a ses propres couleurs.

Certaines sont plus adeptes de yoga, d'autres de massages, ou encore de chant...et la future famille se sentira en confiance en fonction de ses attentes individuelles.

C'est un choix mutuel, l'histoire d'une rencontre.

Une doula c'est un accompagnement à la fois subtil, sensible et très pragmatique des femmes, des hommes, du couple.

Entre coulisses et première loge, voilà comment oscille notre place aujourd'hui en France !

Elle aide à anticiper le retour à la maison dans une nouvelle organisation.

Elle sera souvent assimilée à du service à la personne, car elle peut aussi être un soutien domestique comme faire la lessive, la cuisine, le ménage, garder les plus grands pour que la mère prenne le temps d'accueillir cet enfant.

La doula évolue en réseau et peut être le relais pour faire connaître les intervenantes locales de la Leche League par exemple, mettre en lien plusieurs mamans pour échanger les expériences, orienter vers un professionnel de santé, etc, etc...

Et pour affiner ce portrait, il est important d'énoncer aussi ce qu'elle n'est pas.

La doula n'est pas une sage femme et ne peut pas remplacer une sage femme, elle n'intervient pas pour le suivi médical. Elle n'est ni un coach, ni une psy, ni une assistante sociale.

Mais comment devient-on doula ?

En France, les doulas sont acceptées officieusement dans certaines maternités. Il n'existe pas de code APE concernant le métier de doula, donc pas de reconnaissance du code du travail.

C'est un véritable défi et un travail de longue haleine pour que la profession soit reconnue. Certaines se déclarent comme profession libérale, ce qui explique aussi les différences de tarifications horaires, entre 12 euros ou 80 euros...

Depuis 2006, une association, « Doulas de France » œuvre pour ce changement, faire en sorte qu'elles aient leur place parmi les intervenants qui gravitent autour de la naissance, en s' engageant à respecter sa charte éthique dans leur activités de doula.

Il existe un répertoire des doulas de France où sont inscrites certaines doulas. D'autres se forment auprès de Liliana Lammers et Michel Odent, ou d'autres aimeront des saveurs québecoises comme la formation offerte par Isabelle Challut du centre Pleine Lune. Il en existe d'autres, et je ne les connais pas toutes. Si la transmission diffère, le message reste le même.

Notre monde change, et c'est au quotidien et dans nos habitudes que l'on peut agir pour le rendre meilleur. Une consommation responsable, une alimentation régénérante, des relations conscientes, une éducation bienveillante et une naissance heureuse.

Un enfant accueilli avec douceur, humanité, liberté et responsabilité aura de bonnes bases pour ce nouveau monde à construire...C'est tout cet espoir que véhicule la doula.

Article écrit par Aurélie Viard pour le magazine Bio contact n°295 - Novembre 2018